14 décembre 2008

La suppression de la publicité sur France Télévisions

Ça y est, la suppression de la pub sur les écrans de France2, France3, France4 et France5 à partir du 5 janvier 2009, est votée. Par 30 voix contre 18, l'article 18 a été adopté.

De 20h à 6h du matin, les téléspectateurs ne devraient plus voir de spots publicitaires sur les chaînes de France Télévisions. La journée (de 6h à 20h, donc), la publicité y demeure... pour l'instant. Mais elle devrait aussi en être supprimée en novembre 2011, quand France Télévisions aura définitivement basculé de l'analogique au numérique.

Concrètement, s’il n’y a plus de pubs qui coupent le journal télévisé et le programme du soir de France2, le prime time commencera à 20h35, au lieu de 20h50, comme c’est le cas actuellement. Soit 15 minutes plus tôt. De même, la série «Plus Belle la vie», sur France3, ne commencera plus à 20h20 mais à 20h10.

Les soirées télé devraient donc commencer plus tôt, non seulement sur France Télévisions mais aussi sur M6 et TF1 qui vont devoir s'aligner.

Sur France Télévisions donc, il n’y aura plus de pub après 20h, mais entre 20h30 - la fin du JT sur France2 - et 20h35 - le début du prime time, il y aura: une page météo parrainée par une marque, une bande-annonce faisant de l’auto-promotion pour les programmes de la chaîne, avec une marque qui fait le parrainage, et un programme court, comme "C malin comme maison" avec Butagaz.

La publicité commerciale, après 20 heures, représenterait moins de 8 % du marché global de la pub télé en France. Ce sont les chaînes privées qui vont devoir compenser en partie la perte par une taxe imposée. D’autre part, la publicité commerciale devrait se répartir sur beaucoup d’autres supports et pas simplement sur M6 ou TF1.

Les réactions européennes face à la publicité pour enfants

Les législations suédoise et norvégienne interdisent depuis 1991 la diffusion de spots publicitaires vantant des produits s'adressant aux enfants de moins de 12 ans. "Toutes les études démontrent que, en dessous d'un certain âge, les enfants ne sont pas en mesure de distinguer une publicité d'un programme", explique Lars Marén, spécialiste des médias au ministère de la Culture Suédois. Pour les autorités suédoises, il s'agit de contrôler ce que l'enfant voit lorsqu'il passe en moyenne deux heures par jour à regarder la télévision.

Cependant, la publicité contribue grandement à la qualité des programmes pour enfants diffusés à la télévision en clair et réalisés en Europe. Elle apporte en effet une part significative de ses financements. Selon le Groupe européen de la publicité télévisée (EGTA, European Group of Television Advertising), 94 % des revenus nets provenant de la publicité destinée aux enfants sont réinvestis dans des programmes pour la jeunesse (soit 241 millions d'euros) dans l'Union européenne. À l'ére du numérique, il n'existe pas d'autre alternative aux revenus publicitaires pour assurer le financement de la création d'ouvres originales (films et émissions) pour enfants ainsi que pour acquérir les droits de diffusion de programmes. Alors quelles sont les autres initiatives qui ont été choisies ?

De plus, en Suède, la chaîne SVT1 diffuse REA, un programme hebdomadaire de trente minutes qui propose des tests sur les marques, des parodies de spots publicitaires, des débats sur l'argent de poche et la consommation éthique. Cette émission ludique spécialement conçue pour les 9-14 ans est un succès. La BBC et la ZDF allemande ont créé une chaîne pour enfants gratuite et sans publicité.

L'Independent Television Comission en Grande-Bretagne interdit la diffusion d'une publicité pour un produit dérivé d’une émission qui vient d’être diffusée ou encore l'utilisation des personnages favoris des petits dans des spots diffusés avant 21 heures. La Grande-Bretagne, où 22 % des mineurs seraient victimes d'obésité selon l'OMS (Organisation mondiale de la santé), a banni toute publicité pour aliments trop gras, trop sucrés ou trop salés des émissions destinées aux moins de 16 ans et des programmes pour adultes attirant un large public jeune.

Au Québec, la promotion de la “junk food” a également été interdite en direction des enfants.

En Belgique, la promo pour enfants est interdite cinq minutes avant et après les programmes qui leur sont destinés.

Aux Pays-Bas, les chaînes publiques ne peuvent pas couper par des écrans de publicité des programmes s'adressant aux enfants.

Pour sa part, le gouvernement Français tend à privilégier la mise en place de mesures de régulation et d'autodiscipline en adéquation avec ses valeurs culturelles et morales. Dans le cadre de leurs compétences respectives, le conseil supérieur de l'audiovisuel et le bureau de vérification de la publicité attirent régulièrement l'attention des professionnels des médias sur l'importance qu'ils attachent au respect des principes déontologiques en matière de publicité à la télévision, tout particulièrement lorsque celle-ci s'adresse aux mineurs.

Au niveau mondial, plusieurs entreprises du secteur agroalimentaire ont déjà pris des mesures volontaristes concernant leur publicité adressée aux enfants. Ainsi, aux États- Unis, dix des plus grosses firmes alimentaires (Kraft, Coca-Cola, General Mills, Mc- Donald's, Pepsico, Unilever, etc.), qui comptent pour plus des deux tiers des investissements pour les enfants, ont pris des engagements concernant leurs communications envers les moins de 12 ans : consacrer la moitié de leurs investissements publicitaires à des produits plus sains ou à la promotion d'une meilleure alimentation, limiter l'utilisation du licensing, etc.

En Europe, certaines marques ont été jusqu'à s'interdire toute communication envers les plus jeunes. Comme Kraft Jacob Suchard qui a renoncé à tout investissement publicitaire à la télévision, la radio et dans les magazines pour les campagnes concernant les moins de six ans.

La réglementation de la publicité à destination des enfants en Europe

La directive “Télévision sans frontières” élargit le champ de diffusion de la publicité télévisée. Les députés se sont prononcés pour l'autorisation des coupures publicitaires toutes les 30 minutes (au lieu des 45 actuelles), y compris dans les programmes pour enfants et les industries agro-alimentaires sont invitées à adopter un code de conduite volontaire.

L’association de défense des consommateurs Consommation, Logement et Cadre de vie - CLCV s'associe à l'initiative de Consumers international en faveur d'un code relatif à la commercialisation des produits alimentaires auprès des enfants, pour lutter contre l'obésité.

Le programme "Responsible Advertising and Children" (RAC) représente les annonceurs, les agences de publicité et les médias de toute l'Europe. Son objectif est de veiller à ce que les communications commerciales destinées aux enfants soient réalisées de manière responsable. Le secteur de la publicité s'est fixé des normes à respecter, même si celles-ci ne peuvent en aucun cas remplacer le rôle des parents dans l'apprentissage du décodage des messages publicitaires de leurs enfants.

La législation de l'Union européenne soumet l'activité publicitaire à des règles très strictes. Les articles 10 à 16 de la directive "Télévision sans frontières" concernent plus spécifiquement la publicité à la télévision. L'article 16 s'intéresse aux mineurs :

Article 16
La publicité télévisée ne doit pas porter un préjudice moral ou physique aux mineurs et doit, de ce fait, respecter les critères suivants pour leur protection :
a. elle ne doit pas inciter directement les mineurs à l'achat d'un produit ou d'un service, exploitant leur inexpérience ou leur crédulité;
b. elle ne doit pas inciter directement les mineurs à persuader leurs parents ou des tiers d'acheter les produits ou les services concernés;
c. elle ne doit pas exploiter la confiance particulière que les mineurs ont dans leurs parents, leurs enseignants ou d'autres personnes;
d. elle ne doit pas, sans motif, présenter des mineurs en situation dangereuse.

Ce sont les dispositions réglementaires européennes (la directive "Télévisions sans frontières"), la législation nationale des différents Etats membres, mais également un système fondé sur l'auto-discipline et les codes de la Chambre internationale de commerce (ICC, International Chamber of Commerce), qui permettent de s'assurer que les messages publicitaires destinés aux enfants respectent les règles fixées et assurent un niveau de protection élevé.

A l'échelle européenne, l'EASA (European Advertising Standards Alliance, www.easa-alliance.org) bénéficie du soutien des professionnels du secteur, veille à l'existence d'une collaboration étroite entre les organismes d'auto-discipline nationaux, les annonceurs, les agences et les médias, afin que soient respectées les règles strictes édictées dans et par le secteur, ainsi qu'à l'efficacité du système de résolution des litiges transfrontaliers. L'EASA est également un moyen, pour le programme RAC, d'encourager les bonnes pratiques et de promouvoir l'application de codes aptes à satisfaire les exigences de la société civile.

Les membres du programme RAC sont résolus à poursuivre le dialogue entamé avec les associations de consommateurs, les instances de régulation, les législateurs, les parents et les enseignants, en vue d'aider les jeunes à développer un sens critique qui leur permette de décrypter le monde des médias. Des initiatives comme "Media Smart Grande-Bretagne" jouent un rôle crucial en permettant aux enfants de porter un regard critique sur les messages commerciaux dans leur vie quotidienne.